La construction des bains douches de Saint-Ouen

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  • Le document du mois de septembre 2023 est une affiche, datée de 1933, annonçant la construction des bains-douches municipaux de la commune de Saint-Ouen par adjudication au rabais.
  • Cette pièce est extraite du dossier de construction des bains-douches retrouvé dans les archives de la commune de Saint-Ouen, pour l’heure, encore conservées au sein de la mairie.
  • Le dossier dont est extraite cette affiche est riche de détails sur la conception et les travaux renseignés par les différents mémoires de l’architecte et des entrepreneurs ainsi que grâce à la correspondance échangée, notamment avec la Préfecture. Il ne contient toutefois pas les plans initiaux du bâtiment.
  • L’adjudication au rabais de quatre lots dont il est ici question se fait au moyen de soumissions cachetées, remises en séance publique. L’entrepreneur dont la soumission présente le rabais le plus considérable, est déclaré adjudicataire.
  • Les adjudicataires doivent fournir un cautionnement dont l’importance est déterminée par le cahier des charges établi par l’architecte en charge du projet. En l’occurrence, il s’agissait d’Octave Dècle dont l’agence se trouvait à Amiens au 38, rue du Vivier.
  • Le bâtiment est aujourd’hui toujours visible dans le centre bourg, rue Ambroise Croizat. Il est reconnaissable à son fronton indiquant « Bains-douches 1934 » et à son style art déco prononcé, formant un contraste notable entre l’église en pierre calcaire, à laquelle il est quasiment accolé, et l’ancienne école de garçons, ancienne mairie et un temps annexe de l’école de filles, construite en brique rouge.

  • Une photographie du bâtiment réalisée par l'Inventaire du Patrimoine de la Région est disponible ici : Bains-douches de Saint-Ouen

  • Le montant du projet s'élève à 109 500 francs et son financement fut rendu possible grâce, d’une part, à la participation du ministère de l’Intérieur, sollicitée par la commune pour une demande de subvention sur le produit des jeux d'argent et, d’autre part, par une imposition extraordinaire autorisée par la Préfecture.

  • Les bains douches de Saint-Ouen furent achevés en 1934 et permirent l’accès des saint-ouennais à l’hygiène publique.

Mise en place et fonctionnement

  • Les bains-douches furent ouverts à partir du 6 octobre 1934 les samedi de 9h à 18h avec une interruption d’une heure et demie pour le repas du midi, et les dimanche de 9h à 13h.
  • Les prix furent fixés à 1,5 francs la douche, 2,5 francs le bain tandis que la cabine se louait 4 francs pour deux personnes et les serviettes et bonnets de bain 0,25 francs.
  • Il était possible de compter huit personnes à la fois car les bains-douches étaient équipés de six cabines de douches et de deux baignoires individuelles en fonte émaillée dotées de robinets permettant l’eau froide ou l’eau chaude. Ces huit ensembles étaient séparés dans des cabines individuelles.
  • Chaque personne disposait de son propre savonnier mural en cuivre nickelé, son porte serviette, sa glace et sa tablette ainsi qu’un portemanteau et un tabouret personnel. L’intérieur du bâtiment portait l’inscription « Honneur à nos invités » comme l’atteste le devis de l’entreprise chargée des peintures et de la vitrerie.

L'hygiénisme public en France au tournant des XIXe et XXe siècles

  • La naissance des établissements de bains-douches date de la seconde moitié du XIXème siècle. Les sociétés occidentales alors en pleine révolution industrielle se préoccupent de cette question de salubrité publique car la santé du peuple, des ouvriers, détermine la main d’œuvre disponible dans les usines.
  • La concentration urbaine qui résulte des exodes ruraux accentue les problèmes sanitaires. Si l’invention de la douche en 1872 par le docteur Merry Delabost marque le début d’une révolution de l’hygiène, il faut attendre la loi Strauss de 1906 qui fait entrer la construction des bains-douches dans le domaine public. Elle étend la possibilité de financement des logements sociaux par les Caisses d’Épargne, aux bains-douches. L’année d’après, une nouvelle loi permet à l’État de prélever 15% sur les profits des cercles de jeux au profit d’œuvres d’assistance, de prévoyance et d’hygiène. Les années 1920, durant lesquelles la douche devient la norme, voient alors fleurir ces établissements.
  • Dans les années 1950 et 1960, les plans de construction des nouveaux logements sociaux intègrent tous une salle de bain. Les municipalités commencent à fermer les lavoirs dans les années 1970 mais les bains-douches ne plient boutique que dans les années 1990. Toutefois, à l’heure actuelle, dans de grandes villes, les bains-douches retrouvent leur utilité pour des pans de la population qui ne disposent pas de salle de bains chez eux. C’est le cas des bains-douches d’Oberkampf à Paris. L’urgence est la même à Marseille, Nantes ou Lyon où les municipalités remettent en fonctionnement ces équipements au regard d'une demande et d'une fréquentation croissantes.